Le monstre d'acier endormi
En général, cela commence par une mise sous cocon, un arrêt temporaire. Personne n'est dupe. C'est du temporaire qui dure, du genre de ceux qui se terminent mal. Le haut-fourneau B n'échappera pas à cette règle. Après quelques soubresauts ou devrais-je dire, une lente agonie, son arrêt définitif en 2011 signe la fin de la sidérurgie liégeoise.
Pendant plusieurs décennies, le HFB, son copain le HF6 et toute l'industrie métallurgique du coin ont noirci les poumons de milliers d'habitants tout en leur donnant du travail (toujours ce choix cornélien entre économie et santé publique...). Depuis l'arrêt, certes on respire un peu mieux mais 3000 ouvriers ont perdu leur travail. La ville peine à s'en remettre. Mittal, lui, a toujours ses poches bien pleines.
De mon côté, depuis le plancher de coulée, je contemple cette énorme et complexe machinerie stoppée net 5 ans auparavant. Le haut-fourneau est là devant moi, haut de ses 80 mètres. Il me fascine. J'essaye, comme souvent, de m'imaginer comment devait être l'endroit au plus fort de son activité. Quel était le quotidien des ouvriers ? Chaleur insoutenable ? Air irrespirable ? Bruit assourdissant ? Danger omniprésent ? Tout cela à la fois sans aucun doute. Tout cela pour de l'acier.